vendredi 9 mai 2008

Courtisane?! Qu'entendez-vous par courtisane?

J e suis fâchée contre celui ou celle qui a intitulé mon histoire : "le journal d'une courtisane". Il y a un risque de méprise. N'aurait-il pas été plus simple et judicieux d'écrire "histoire de Natacha"? Hein? je vous demande. A l'origine, le terme de courtisane désigne une femme vivant à la cour. Femme vivant à la cour... mmoui! C'est la définition exacte et purement étymologique. Mais est-ce vraiment moi? Car, c'est bien joli tout cela... mais d'abord à propos de journal, j'ignore ce que c'est; de cour, je n'y ai vécu que deux ans et enfin de "femme", je n'ai guère eu le loisir de le devenir comme vous savez.

Mais cela n'est rien.

Non, si je suis fâchée, c'est à cause de la connotation scandaleuse que ce mot a revêtu progressivement. Courtisane (Куртизанка comme on écrit dans ma langue), synonyme de prostituée ou de concubine! C'est un défaut des hommes d'attribuer au sexe faible toutes leurs mauvaises pensées dès qu'on féminise un mot. Un courtisan est une personne attachée à la cour d'un Prince, tandis qu'une courtisane... ah ça! ce ne peut être qu'une femme de petite vertu! Voyez donc comment les hommes nous considèrent, nous les faibles créatures soumises à leurs pouvoir!

Par Saint-Michel, c'est une offense que je ne mérite pas et une atteinte directe à mon honneur. Comment pouvez-vous m'attribuer cette qualité sans encore me connaître? Je n'étais rien de tout cela! Je vous le jure sur la bible. J'ai fais mon entrée à la cour à l'âge de quatorze ans. Croyez-vous vraiment, vous qui m'affublez de ce titre infamant, que ma petite personne intéressait les grands personnages qui peuplaient le Palais d'Hiver?

Allons donc! Ces gens là étaient, pour la plupart, de grands rapaces tout en becs et en griffes. Moi, par rapport à eux, je n'étais qu'une petite hirondelle tombée trop vite de son nid. Les rapaces ne se lient qu'avec d'autres rapaces et n'ont que faire d'un jeune oiseau perdu dans les grands couloirs de l'Ermitage.

La comparaison entre les aigles et l'hirondelle n'est pas seulement figurative. Sachez que je ne l'emploie pas non plus pour me valoriser en terme poétique. C'était (presque) la réalité. J'ai souvent gagné mon salut en me réfugiant dans les interstices qui restaient inaccessibles aux grands aigles carnassiers et que seule une petite hirondelle comme moi pouvait atteindre. A la cour de Russie, les dorures et les habits de soie ne sont qu'apparence, les grands mangent les petits et la pitié est un concept inconnu.

La cour est un monde sauvage, aussi sauvage que les forêts sauvages peuplées de bêtes carnivores. Et il s'en fallut de peu que je ne fusse croquée dès le premier mois de mon installation.

Alors, croyez moi, si les courtisans sont des hommes attachés à la cour d'un Prince, la courtisane s'attache d'abord à survivre à cette cour, méchante et cruelle comme le monde.



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